La liberté d’expression, c’est-à-dire le droit d’exprimer librement ses opinions, fait partie des libertés fondamentales, piliers de notre démocratie. Sa garantie et son respect favorisent l’émergence d’une société ouverte, tolérante et respectueuse de l’état de droit.
Un droit fondamental
En France, c’est l’article 11 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen du 24 août 1789, qui a conféré une existence juridique à la liberté d’expression :
« La libre communication des pensées et des opinions est un des droits les plus précieux de l’homme : tout citoyen peut donc parler, écrire, imprimer librement, sauf à répondre de l’abus de cette liberté dans les cas déterminés par la loi. »
Déclaration des droits de l’homme et du citoyen, article 11.
Consacré par l’article 10 de la Convention européenne des droits de l’homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 et repris par la Charte des droits fondamentaux de l’Union Européenne du 7 décembre 2000 dans son 11e article, la liberté d’expression est un droit supranational qui s’impose aux Etats membres et signataires.
La liberté d’expression est non seulement garantie pour les « informations » ou « idées » accueillies avec faveur ou considérées comme inoffensives ou indifférentes, mais aussi pour celles qui heurtent, choquent ou inquiètent l’Etat ou une fraction quelconque de la population (cf. arrêt Handyside c. Royaume-Uni du 7 décembre 1976, & 49).
… mais pas une liberté absolue
Pourtant, cette liberté d’exprimer librement ses idées n’est pas une liberté absolue et certaines limites s’imposent à son exercice. Des restrictions, pour des motifs précis, sont prévues par le droit et notamment le droit européen. Ainsi, toute incitation à la discrimination ou la violence ne peut être considérée comme l’exercice légitime du droit à la liberté d’expression.
En droit européen, la liberté d’expression est notamment encadrée par les dispositions du second paragraphe de l’article 10 de la Convention européenne des droits de l’homme et des libertés fondamentales précité qui circonscrit son exercice et le soumet à « certaines formalités, conditions, restrictions ou sanctions prévues par la loi, qui constituent des mesures nécessaires, dans une société démocratique, à la sécurité nationale, à l’intégrité territoriale ou à la sûreté publique, à la défense de l’ordre et à la prévention du crime, à la protection de la santé ou de la morale, à la protection de la réputation ou des droits d’autrui, pour empêcher la divulgation d’informations confidentielles ou pour garantir l’autorité et l’impartialité du pouvoir judiciaire ».
Par ailleurs, cet article se voit limiter par un autre article de la Convention, l’article 17, qui prévoit :
« Aucune des dispositions de la présente Convention ne peut être interprétée comme impliquant pour un Etat, un groupement ou un individu, un droit quelconque de se livrer à une activité ou d’accomplir un acte visant à la destruction des droits ou libertés reconnus dans la présente Convention ou à des limitations plus amples de ces droits et libertés que celles prévues à ladite Convention. »
Cette disposition a pour but d’empêcher les personnes de tirer de la Convention un droit leur permettant de se livrer à une activité ou d’accomplir un acte visant la destruction des droits et libertés reconnus dans la Convention.
Sans liberté d’expression, il ne peut donc pas y avoir de démocratie. Elle est indispensable à la stabilité de la société puisqu’elle participe à la libre circulation des idées. La jurisprudence de la Cour européenne confère à la presse un statut particulier dans l’exercice des libertés. Selon la Cour européenne : « la presse joue un rôle essentiel dans le bon fonctionnement d’une démocratie ».
Des limites clairement posées
Le principe ainsi posé, encore faut-il aussi en connaître les limites. Celles-ci sont relativement nombreuses du fait du nombre d’exceptions spécifiques touchant au statut particulier des personnes (devoir de réserve, par exemple) ou à la nature des informations concernées (secret médical, secret défense).
On peut néanmoins citer quelques règles d’ordre général :
- Limite 1 – Ne pas porter atteinte à la vie privée et au droit à l’image d’autrui.
- Limite 2 – Ne pas tenir certains propos interdits par la loi : l’incitation à la haine raciale, ethnique ou religieuse, l’apologie de crimes de guerre, les propos discriminatoires à raison d’orientations sexuelles ou d’un handicap, l’incitation à l’usage de produits stupéfiants, le négationnisme.
- Limite 3 – Ne pas tenir de propos diffamatoires : la diffamation se définit par toute allégation ou imputation d’un fait qui porte atteinte à l’honneur ou à la considération d’une personne. Il est possible pour se défendre d’une accusation de diffamation d’invoquer l’exception de vérité, c’est-à-dire de rapporter la preuve de la vérité de ses propos.
- Limite 4 – Ne pas tenir de propos injurieux : l’injure se définit comme toute expression outrageante, termes de mépris ou invective qui ne renferme l’imputation d’aucun fait.
- Limite 5 – Il existe également des limites spécifiques telles que le secret professionnel, le secret des affaires et le secret défense.
- Limite 6 – Certaines personnes, en raison de la fonction qu’elles occupent, sont tenues à un « devoir de réserve ». C’est le cas des fonctionnaires qui doivent exprimer leurs opinions de façon prudente et mesurée, de manière à ce que l’extériorisation de leurs opinions, notamment politiques, soit conforme aux intérêts du service public et à la dignité des fonctions occupées. Plus le niveau hiérarchique du fonctionnaire est élevé, plus son obligation de réserve est sévère.
Sources :